Accueil > Français > Amérique latine et Caraïbes > ÉQUATEUR - Nouvel accord pour des millions de dollars avec les États-Unis : (…)
ÉQUATEUR - Nouvel accord pour des millions de dollars avec les États-Unis : Que cache cette coopération en matière de sécurité ?
Sergio Pintado
vendredi 18 octobre 2024, mis en ligne par
Toutes les versions de cet article : [Español] [français]
23 septembre 2024.
Le président équatorien, Daniel Noboa, fait appel à nouveau aux États-Unis pour financer, à hauteur de 25 millions, la lutte contre le crime. Dialoguant sur Spoutnik, l’analyste Omar Sempértegui a déclaré que le projet prétend « améliorer l’image » de Noboa et donner de Washington l’image d’une « puissance bienfaitrice ». Neuf mois après l’éclatement de la crise sécuritaire en Équateur avec la déclaration de l’état d’exception, le gouvernement de Daniel Noboa a eu à nouveau recours aux États-Unis pour qu’ils fournissent de nouvelles forces de sécurité qui donneraient aux Équatoriens l’impression d’une sécurité qui semble ne jamais avoir été assurée.
En effet, la chancelière équatorienne, Gabriela Sommerfeld, a signé le 13 septembre un accord avec l’ambassadeur des États-Unis, Arthur Brown, qui prévoit l’octroi au gouvernement équatorien d’un total de 25 millions de dollars, dont 10 millions ont déjà été crédités le jour même de la signature.
Dans un communiqué, le Gouvernement équatorien a précisé que l’argent sera utilisé pour « des projets dans le domaine de la sécurité citoyenne, la lutte contre le crime transnational et le renforcement des institutions judiciaires et de la sécurité de l’Équateur » et qu’ils sont menés dans le cadre « d’un vaste projet de coopération bilatérale » entre les deux pays.
La coopération avait été relancée en octobre 2023, par un mémorandum d’accord signé par le gouvernement d’alors de Guillermo Lasso (2021-2023) et la Maison-Blanche qui, sous le prétexte de combattre les groupes armés, autorisait des effectifs militaires états-uniens à circuler en toute liberté sur le territoire équatorien, avec le même degré de protection que celui dont bénéficiaient les fonctionnaires diplomatiques.
À ce moment-là, le gouvernement de Lasso affirma que Washington investirait quelque 3,1 milliards de dollars en sept ans pour améliorer la sécurité de l’Équateur. À cela doivent s’ajouter 172 millions de plus que, selon une étude du Centre latino-américain de géopolitique (CELAG), les États-Unis avaient déjà injectés en Équateur entre 2021 et 2022.
L’Équateur, nouvel associé des États-Unis en Amérique du Sud
L’accord avec Washington a été ratifié par Noboa qui, quelques jours seulement après avoir déclaré l’état d’exception sur le territoire équatorien, avait reçu à Quito la commandante du Commandement sud états-unien, Laura Richardson. À cette occasion le mandataire sud-américain avait déclaré que les États-Unis sont « un allié stratégique pour l’Équateur ».
« Dès le début de sa gestion, Noboa s’est affiché comme un allié des États-Unis dans la région, à un moment où divers pays qui avaient historiquement de bonnes relations avec les États-Unis, comme le Mexique, la Colombie, le Brésil, manifestent à présent leur rejet du rôle de Washington dans la région », a déclaré à Spoutnik l’analyste international Omar Sempértegui.
L’expert a indiqué que cette nouvelle annonce non seulement a lieu dans un contexte pré-électoral en Équateur, mais après que le Plan Phénix, lancé par Noboa pour combattre les groupes criminels, n’ait pas donné les résultats espérés par la population. Selon Sempértegui les mesures « n’ont pas donné de résultats » et, après « un bon début », en février 2024, l’efficacité du plan « a cessé et la paix que souhaite tant le peuple équatorien n’a pas été restaurée ».
Sempértegui a fait remarquer que la situation prouve que « l’Équateur ne peut pas lutter seul contre ce problème et que, pour cette raison, il fait appel aux États-Unis ». En ce sens il a regretté que n’existe pas « une plateforme internationale multilatérale » qui permettrait aux pays latino-américains d’adopter des politiques communes en matière de sécurité et particulièrement de crime transnational.
Les résultats dans la région s’obtiennent « en unissant les forces », a dit l’analyste pour qui ces efforts pourraient être faits conjointement par le Brésil, le Mexique, l’Argentine, la Colombie et le Chili, « une sorte de G5 latino-américain ». Ainsi cette nouvelle attribution de millions, selon lui, peut s’envisager de deux points de vue : un qui permet à Washington de « se montrer comme une puissance mondiale bienfaitrice qui aide les pays de la région pour la question de leur sécurité », et l’autre qui considère l’accord comme une réussite de Noboa qui peut « améliorer son image », dans la perspective des élections de février 2025.
L’analyste a redit que l’image du président équatorien non seulement s’est dégradée en raison du manque de résultats en matière de sécurité mais aussi des problèmes de fourniture d’énergie électrique qui engendre des coupures massives dans le pays.
Bases militaires des États-Unis en Équateur ?
« Noboa cherche à améliorer son image par tous les moyens », a dit l’expert, rappelant que parmi les dernières mesures du président il y a celle de la baisse des tarifs de l’énergie. En matière de sécurité, Noboa a créé la surprise aussi en annonçant, le 16 septembre, qu’il proposerait à l’Assemblée nationale d’annuler l’interdiction d’installer des bases militaires étrangères sur le territoire équatorien, ce qui était interdit par la constitution de 2008, approuvée au cours du mandat de Rafael Correa (2007-2017).
L’Équateur n’avait pas manqué d’opportunités mais d’honnêteté et de volonté politique.
Pour cette raison, aujourd’hui nous présenterons un projet de réforme partielle de la constitution à l’Assemblée nationale qui modifiera l’article 5, qui interdit l’installation de bases militaires et étrangères et… pic.twitter.com/myn2IBjHa9 — Daniel Noboa Azin (@DanielNoboaOk), 16 septembre 2024
Si elle était approuvée la mesure pourrait permettre aux États-Unis d’installer, dans le cadre des accords de coopération successifs qu’ils ont avec l’Équateur, une base sur le territoire équatorien.
En janvier 2024, l’analyste du Celag, Aníbal García Fernández, avait rappelé, dans une interview à Spoutnik, que les États-Unis ont depuis longtemps l’intention d’installer sur les Îles Galápagos, une enclave qui pourrait leur assurer « le contrôle d’une certaine partie du Pacifique dans le cas d’un scénario belliqueux avec la Chine ».
Traduction française de Françoise Couëdel.
Source (espagnol) : https://rebelion.org/nuevo-acuerdo-millonario-entre-ee-uu-y-ecuador-que-hay-detras-de-la-cooperacion-en-seguridad/.