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COLOMBIE-VENEZUELA - Petro et Maduro relâchent les tensions, évitent une fracture et parient sur l’intégration

Álvaro Verzi Rangel

lundi 15 avril 2024, mis en ligne par Françoise Couëdel

Toutes les versions de cet article : [Español] [français]

11 avril 2024.

La cinquième rencontre à Caracas entre les présidents du Venezuela, Nicolás Maduro et celui de Colombie, Gustavo Petro, révèle le rapprochement et le renforcement des relations entre les deux pays en faveur d’un projet qu’ils partagent, dans l’intérêt de maintenir un canal de communication ouvert qui permette d’aborder, conjointement, les défis et les opportunités qui se présentent à l’échelle binationale, régionale et internationale.

Cette nouvelle rencontre a eu lieu après la surinterprétation médiatique des déclarations du président Gustavo Petro concernant les élections au Venezuela. Les présidents se sont engagés à un soutien mutuel, à « la paix et la stabilité politique, sociale et économique » dans leurs deux pays. Après avoir critiqué l’inscription libre des candidatures de l’opposition pour les présidentielles du 28 juillet, qu’il qualifiait de « coup antidémocratique » , Petro a déclaré que la Colombie travaillera pour « la paix politique » au Venezuela à la demande de Maduro.

Les chancelleries de Colombie et du Brésil se sont jointes aux communiqués d’autres pays de la région concernant les candidatures au Venezuela : on ne peut pas écarter les pressions exercées depuis Washington pour encourager des pronunciamientos et restreindre le développement normal des relations diplomatiques du Venezuela avec ses voisins.

Entre pronostics alarmistes et réalité

Les pronostics alarmistes concernant une fracture imminente des relations entre les deux pays, qui se sont répandus quelques jours avant la réunion des deux leaders, ont dû être influencés par la presse hégémonique et les politiques de l’opposition, de part et d’autre de l’Arauca.

La rencontre a prouvé que les deux nations ont une vision commune concernant les conflits qui existent sur le continent et sur les actions de la Colombie dans le cadre de sa future présidence pro tempore de la Communauté des États latino-américains et de la Caraïbe (CELAC) dont elle sera en charge en 2025, le conflit et le génocide en Palestine, la guerre en Ukraine et les menaces bellicistes dans le monde.

Mercredi, le président de la Colombie, Gustavo Petro, a annoncé sur les réseaux sociaux qu’il a rencontré des secteurs de l’opposition vénézuélienne, après avoir rencontré hier le chef d’État, Nicolás Maduro. Petro a ouvert la porte en tant que médiateur pour ce qui est des divergences entre le Gouvernement national et l’opposition vénézuélienne et il a plaidé en faveur du dialogue entre ces secteurs.

« Hier j’ai rencontré le président Maduro et aujourd’hui des secteurs de l’opposition vénézuélienne dans la perspective de construire la paix politique » a écrit le mandataire de la nouvelle Grenade sur son compte du réseau social X. 1 [1].

Sur cette question il a déclaré qu’il s’agit d’« une médiation colombienne, une médiation colombienne pour obtenir la paix politique au Venezuela ». Pour cela il a présenté « une proposition » à son homologue vénézuélien et à des « secteurs de l’opposition, sans doute les plus importants en ce moment, pour faire en sorte que ce pays puisse jouir de la paix politique ». « La paix politique au Venezuela peut aussi être la paix du dépôt des armes en Colombie », a-t-il ajouté.

Dans le cadre de la dynamique régionale, Petro et Maduro ont débattu de la situation en Équateur, ont exprimé leur solidarité au gouvernement mexicain après la violation du Droit international, par les troupes équatoriennes qui ont fait irruption dans l’ambassade de ce pays et séquestré l’ex-vice-président Jorge Glas. Ils ont aussi abordé la situation en Haïti et se sont accordés sur la nécessité de chercher une solution immédiate à la crise sanglante que vit la nation caribéenne.

Les mandataires, qui ont minutieusement passé en revue les aspects de cette relation bilatérale, ont exprimé leur satisfaction concernant les avancées en matière de commerce et de transport ainsi que pour la consolidation d’un réseau de garantie énergétique binational qui inclut des projets d’énergies propres. « Nous avons eu une conversation intéressante avec nos équipes de travail. Nous avons passé en revue la façon dont évolue et progresse la relation entre le Venezuela et la Colombie et les nouvelles opportunités qui s’ouvrent dans tous les domaines », a dit Maduro.

Faire le pari de l’intégration

Les mandataires ont souligné l’importance de travailler de façon coordonnée pour préserver la paix. Maduro s’est montré disposé à collaborer à la construction de la paix en Colombie et Petro a souligné l’aide apportée par le Venezuela à la résolution du conflit armé dans son pays et a proposé un agenda commun pour promouvoir l’intégration latino-américaine. Quant à la coopération en matière de sécurité et de défense, ils se sont engagés à lutter efficacement contre la délinquance organisée et les délits financiers, incluant l’usage des crypto monnaies.

Les chanceliers du Venezuela et de la Colombie se sont également rencontrés lundi dernier à Cúcuta pour aborder des sujets d’intérêt régional. Le chancelier vénézuélien Yvan Gil a parlé de l’engagement de Caracas dans le processus de paix en Colombie. Le Venezuela est garant du dialogue du gouvernement colombien avec l’Armée de libération nationale (ELN) et, dans les prochains jours, on attend une réunion en territoire vénézuélien concernant le septième tour des négociations

Le chancelier colombien Luis Murillo a déclaré que s’intensifieront les activités de la Commission de voisinage et d’intégration entre la Colombie et le Venezuela, instance qui promeut le développement économique, social et culturel sur la frontière commune, ainsi que l’amélioration des infrastructures et des services publics. La Commission s’attachera à des domaines tels que le transport, la mobilité, les sujets relatifs à la migration, la sécurité, la défense, l’exploitation minière et l’énergie, après des accords partiels dans le domaine commercial et des prestations de services concernant le transport aérien.

Pour ce qui est des comices présidentiels au Venezuela, prévus pour le 28 juillet, Gil a indiqué que l’appel à candidature s’est clos après la participation de 100% des organisations politiques enregistrées au Conseil national électoral, avec douze candidats de l’opposition et Maduro qui se présente à sa réélection. Le Venezuela a élargi son invitation à des observateurs colombiens pour qu’ils soient présents lors du vote. Murillo a souligné l’importance de l’observation des élections par la CELAC pour les prochains comices.

Cryptomonnaies, blanchiment et bandes criminelles

Petro a insisté dans son intervention publique sur le fait que son idée de paix est également en lien avec la sécurité des citoyens, ce qui implique des accords concernant le démantèlement des bandes criminelles et la lutte contre les délits financiers tels que l’usage des crypto monnaies comme moyen de blanchiment d’argent. « Il faut s’assurer que l’Amérique du Sud se protège contre la barbarie », a déclaré Petro.

L’expansion des opérations du Train de Aragua, une bande criminelle originaire du Venezuela a gagné la Colombie, le Pérou, le Chili et d’autres pays, est un sujet de préoccupation régionale. Cette semaine néanmoins, le chancelier vénézuélien, Yvan Gil, a affirmé que l’organisation criminelle « est une fiction créée par les médias internationaux » en réponse à des remarques du Chili sur cette question.

« Maintenant on invente un dénommé Train d’Aragua, une organisation qui a existé au Venezuela, localisée, et qu’on a tenté d’imposer ensuite telle une marque. Nous avons vu, par exemple, comment, de façon ridicule, sortent des vidéos de personnes qui déclarent « nous sommes du Train de Aragua », avec un accent péruvien, un accent chilien », a déclaré Gil.


Álvaro Verzi Rangel est sociologue et analyste international, codirecteur de l’Observatoire en communication et démocratie et analyste senior du Centre latino-américain d’analyse stratégique (CLAE, www.estrategia.la).

Traduction française de Françoise Couëdel.

Source (espagnol) : https://estrategia.la/2024/04/11/petro-y-maduro-aflojan-tensiones-descartan-fractura-y-apuestan-por-la-integracion/.

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[1La Nouvelle-Grenade est le nom ancien désignant la région correspondant approximativement aux actuels États de Colombie, du Panamá du Venezuela et de l’Équateur. Le nom désigne par la suite la seule Colombie

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