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MEXIQUE - Claudia Sheinbaum est élue à la présidence

Alejandro Ruiz

vendredi 14 juin 2024, mis en ligne par Françoise Couëdel

Toutes les versions de cet article : [Español] [français]

3 juin 2024 - Le Mexique a élu la première femme présidente de son histoire, Claudia Sheinbaum et a donné à Morena [1] la majorité qualifiée à la chambre des députés.

Se tenant debout, devant le drapeau du Mexique, Claudia Sheinbaum a prononcé ses premiers mots de première femme élue présidente de ce pays :

« Je n’y suis pas parvenue seule, mais avec toutes. Avec les héroïnes qui ont fait notre patrie, avec nos anciennes, nos mères, nos filles et nos petites filles ».

Elle a énuméré ensuite quelques-unes de ses héroïnes : Sœur Juana Inès de la Cruz, Gertrudis Bocanegra, Josefa Ortiz de Domínguez, Leona Vicario, Margarita Maza, Agustina Martínez Heredia, Dolores Jiménez y Muro, Matilde Montoya Lafragua, Sara Pérez Romero, Carmen Serdán Alatriste, Juana Belén Gutiérrez Chávez, Elvia Carrillo Puerto, Hermila Galindo.

Sa victoire, avec 35 millions de voix au moins, a été spectaculaire, avec 30 points devant la candidate de l’opposition Xóchitl Gálvez, dans une élection où la participation a été de plus de 60% sur 98 millions d’électeurs.

« Chaque jour nous allons continuer à faire du Mexique un pays plus juste, démocratique, libre, souverain, pour continuer à bâtir la grandeur de notre patrie. Soyez en sûrs, nous serons à la hauteur de notre histoire et à la hauteur de ce grand peuple généreux du Mexique ».

La barre est très haut placée et Claudia Sheinbaum le sait. Cette hauteur c’est Andrés Manuel López Obrador qui l’a définie avec son projet de la Quatrième Transformation.

Avancer avec la Quatrième Transformation

Les presque 35 millions de voix qui ont désigné Claudia Sheinbaum sont, sans aucun doute, le fruit de la gestion du président actuel Andrés Manuel López Obrador.

Sheinbaum le sait et, pour cette raison, dans son premier message de présidente élue elle s’est engagée à poursuivre la voie tracée par l’homme du Tabasco : consolider l’état de bien-être et pallier les inégalités sociales au sein de la population.

Elle a également réaffirmé son engagement à poursuivre les mégaprojets d’infrastructure et à consolider le transfert de la Garde nationale au secrétariat de la Défense Nationale.

« Je veux remercier les millions de Mexicaines et de Mexicains qui ont décidé de voter pour nous en cette journée historique pour avancer vers la Quatrième Transformation de la vie publique de notre beau pays. C’est la reconnaissance par le peuple du Mexique de notre histoire, des résultats, de la conviction et de la volonté mais surtout c’est la reconnaissance par le peuple du Mexique de notre projet de nation. »

Le vote a été massif, les gens sont descendus dans la rue. Certains bureaux de vote, même, ont manqué de bulletins. Mais cela n’a pas arrêté les militants partisans d’Obrador et les millions de personnes qui n’étaient pas des partisans, qui ont décidé d’accorder un vote de confiance à la Quatrième transformation, sans que pèsent les contradictions qu’elle suppose.

Un exemple en est le vote pour le renouvellement du pouvoir législatif, où Morena et ses alliés (PT et PVEM) ont atteint la majorité qualifiée à la chambre des députés et à qui il n’a manqué que 4 voix seulement pour l’obtenir au sénat. Le Plan Q sera maintenant une réalité et ce chèque en blanc suppose une grande responsabilité.

Sheinbaum l’a rappelé :

« Je m’engage devant vous à mener le Mexique sur le chemin de la paix, de la sécurité, de la démocratie, des libertés, de l’égalité et de la justice. Je m’engage devant vous à gouverner avec humilité, mais avec une responsabilité pleine et entière ».

Maintenant il faut passer à l’action.

24 heures sur le fil du rasoir

Dans toute l’histoire de la ruelle Durazno, du quartier de San Andrés Totoltepec, Tlalpan, il n’y avait jamais eu autant de représentants de la presse réunis. En fait, au risque de me tromper, je crois que cette petite ruelle de la ville de Mexico, n’avait jamais vu un seul reporter.

Mais ce 2 juin a été l’exception et, pendant un moment, durant quelques heures, les regards du monde entier étaient braqués sur elle.

Depuis 10 h du soir, la veille, des photographes et des caméramans des medias nationaux, locaux et internationaux ont occupé avec leur équipement un espace en face du seul bureau de vote installé dans cette rue. Tous, entassés dans un petit temple étaient là dans un seul but : voir voter la future présidente du Mexique.

Le rendez-vous était à 8 h du matin, dès l’ouverture du bureau de vote. Claudia Sheinbaum est arrivée quand il était presque 10 h du matin.
Dès qu’elle est sortie de sa voiture les gens, ses voisins, lui criaient des messages d’encouragement. Une voisine lui a même dit « Je crois en ton projet ». Sheinbaum n’a pas répondu, elle se contentait de sourire.

Plus tard sur la place principale de la République, elle a dit à des milliers de femmes comme elle, qu’elle croit que se perpétuera l’héritage de López Obrador :

« Nous venons de loin, ce triomphe ne date pas d’aujourd’hui, nous le devons à beaucoup de femmes et d’hommes qui ont lutté pour notre patrie, pour les libertés et la justice, à des hommes et des femmes qui ont donné leur vie pour notre pays, à des mouvements sociaux, des ouvriers, des étudiants, des médecins, des maîtres d’école, des paysans, des femmes. Merci aussi à un homme, j’espère qu’il nous écoute, à un homme qui ne s’est jamais avoué vaincu, n’a jamais cessé de vouer sa vie à la justice et à son peuple. Président, tu as récemment écrit un livre qui s’intitule « Merci ». De là où nous sommes nous te disons, président : « Merci ! C’est un honneur d’être avec toi, Obrador. »

Un calme tendu

Le 2 juin, en réalité, Claudia Sheinbaum n’a pas beaucoup parlé. En déposant son bulletin de vote, par exemple, elle a seulement dit : « Vive la démocratie ! ». Puis ce fut le silence.

C’est tout, même si depuis 6 h de l’après-midi son parti et les premiers résultats lui donnaient une avance de plus de 30 points sur sa rivale Xóchitl Gálvez.

Tout le monde, la radio, la télévision, les intellectuels de l’opposition, tous, la donnaient gagnante. À l’exception de la commission électorale qui, six heures plus tard, a dit ce que tous savaient : Sheinbaum sera la prochaine présidente du Mexique.

La scène de ce théâtre a été le 4e étage de l’Hôtel Hilton Inn, dans la ville de Mexico. Là, au milieu de 6 mille journalistes du monde entier, les dirigeants du parti, nerveux, déambulaient, se remémorant les cauchemars de la fraude électorale.

« Cela ressemble au défilé du prochain cabinet », a dit un confrère. Et il ne semblait pas se tromper car le défilé des personnalités comprenait les ex-ministre Arturo Zaldívar et Olga Sánchez Cordero, le dirigeant national du SNTE, Alfonso Cepeda, ou l’ex-secrétaire du gouvernement Féderal, Adán Augusto López.

Plus discret, bien qu’arborant une copie de son visage sur l’étui de son portable, Marcelo Ebrard [2] a gardé le silence quand Guadalupe Taddei, présidente de l’INE, a confirmé la nouvelle que nous connaissions tous : Claudia Sheinbaum avait battu Xóchitl Gálvez.

La nouvelle a circulé rapidement et presque aussitôt le président López Obrador l’a confirmé et a félicité Claudia Sheinbaum pour sa victoire. « Nous aurons la première femme présidente de l’histoire du Mexique, la première en Amérique du Nord et la femme qui a recueilli le plus de voix », a-t-il dit.

Ensuite, plus réservé, il a dit qu’il en parlerait davantage lors de ses prises de parole matinales. Quelques minutes plus tard Claudia Sheinbaum avouerait que le président l’avait appelée pour la féliciter en privé.

Les paroles qui ont suivi ferment un cycle et en ouvrent un nouveau de l’histoire du Mexique :

« Pour la première fois des 200 années de notre République, je deviendrai la première femme présidente du Mexique ».


Alejandro Ruiz est un journaliste indépendant mexicain qui vit à Querétaro. « Je crois dans les histoires qui permettent d’ouvrir des espaces de réflexion, de débat et de construction collective, avec la conviction que d’autres mondes sont possibles si nous les construisons en partant d’en bas. »

Traduction française de Françoise Couëdel.

Source (espagnol) : https://piedepagina.mx/el-pueblo-de-mexico-refrendo-la-cuarta-transformacion-claudia-sheinbaum/.

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[1Le Mouvement de régénération nationale, connu sous l’acronyme Morena, est un parti politique mexicain issu du mouvement social. Il a été créé en 2011 en tant qu’association civile à l’initiative d’Andrés Manuel López Obrador – NdlT.

[2Marcelo Ebrard, affilié au Parti de la révolution démocratique puis au Mouvement de régénération nationale, est secrétaire des relations extérieures dans le gouvernement Andrés Lopez Obrador – NdlT.

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