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DIAL 3702

MEXIQUE - Le crime organisé décide des candidatures dans plusieurs régions de Guerrero

Jesús Guerrero

vendredi 31 mai 2024, mis en ligne par Dial

Dimanche 2 juin auront lieu des élections fédérales au Mexique. Le peuple mexicain élira son futur président ou présidente, mais aussi 128 sénateurs et 500 députés fédéraux. Dans l’État de Guerrero, le corps électoral élira ce même jour 83 maires et 28 députés de l’État. Mais faire campagne dans les zones contrôlées par des organisations criminelles est loin d’être trivial [1]. Article de Jesús Guerrero publié dimanche 7 avril 2024 sur le site d’Amapola.


Comme lors de précédentes élections, les organisations criminelles qui contrôlent différentes régions de l’État de Guerrero ont décidé qui seront les candidats en 2024 dans de nombreuses municipalités de Tierra Caliente, Zona Norte, Costa Grande, Montaña Baja et Región Centro.

La direction du parti Mouvement citoyen (Movimiento Ciudadano, MC) a indiqué que dans 12 des 83 municipalités, elle n’a pas enregistré de candidats à l’élection municipale parce que des membres du crime organisé n’ont pas donné leur autorisation à leurs candidats.

Dans la région de Tierra Caliente, le MC n’a pas enregistré de candidats à Cutzamala de Pinzón, Ajuchitlán del Progreso et Zirándaro. Dans les six autres municipalités de cette région, Arcelia, Pungarabato, Tlapehuela, San Miguel Totolapan, Coyuca de Catalán et Tlachapa, le parti orange a des candidats en lice, mais il y a un risque que ses candidats se désistent au cours de la campagne, qui commence le 20 avril, selon une source de la direction de ce parti au niveau de l’État.

Lors des élections de 2021, la candidate de MC dans la municipalité de Cutzamala, Marilú Martínez Núñez, son mari et des membres de sa liste électorale ont été privés de leur liberté par un groupe armé six jours avant les élections.

La veille des élections, Marilú Martínez et les autres membres du groupe ont été libérés. Les élections ont été remportées par la candidate du Parti révolutionnaire institutionnel (PRI), Rosa Jaime López, épouse du maire sortant, Timoteo Arce Solís, également du PRI.

Dans la région de Tierra Caliente, hormis MC, les autres partis enregistrés au niveau national – le Mouvement de régénération nationale (Morena) et ses alliés du Parti vert écologiste du Mexique (PVEM) et du Parti du travail (PT), ainsi que la coalition Parti révolutionnaire institutionnel (PRI) - Parti de la révolution démocratique (PRD) et Parti action nationale (PAN) – ont enregistré leurs listes de candidats dans les neuf municipalités. Mais le 3 avril, quelques jours avant la date limite de dépôt des candidatures auprès de l’Institut électoral de participation citoyenne (IEPC Guerrero), Elia Camacho Goicochea, candidate de Morena à la mairie de Coyuca de Catalán, a renoncé à sa candidature, en même temps que l’ensemble de sa liste.

Elia Camacho est la sœur de l’ancien maire et député local de Coyuca de Catalán, Elí Camacho, qui a été abattu par un groupe armé en mars 2017, alors qu’il était fonctionnaire du gouvernement PRI d’Héctor Astudillo. Dans sa lettre de démission, Elia Camacho, qui est également tante de la députée de l’État (PRD), Elzy Camacho, a fait valoir des « situations insurmontables ».

Jacinto González Varona, l’un des leaders de Morena dans l’État de Guerrero, a assuré qu’Elia Camacho avait renoncé à la candidature parce qu’elle avait l’intention d’inclure plusieurs de ses proches sur la liste ; il a rejeté l’hypothèse qu’elle y avait été poussée par les groupes criminels.

Sebastián de la Rosa Peláez, membre du comité exécutif du MC pour l’État du Guerrero, a signalé que son parti n’avait pas pu enregistrer de candidats à la mairie dans les municipalités de Teloloapan, Tetipac, Ixcateopan et Cuetzala del Progreso, qui appartiennent à la Zone nord de l’État.

À Coahuayutla, dans la Costa Grande, aucun membre du MC n’a voulu se présenter, tandis qu’à Mochitlán, Quechultenango et José Joaquín Herrera, les militants du parti orange ont rejeté l’idée de présenter des candidats aux élections municipales, selon les déclarations de Sebastián de la Rosa. Et à Acatepec, une municipalité de la Montaña Alta, le MC n’a pas non plus de candidat.

« Beaucoup de candidats que nous avons réussi à enregistrer dans des municipalités à haut risque, comme Chilapa et autres communes de Tierra Caliente, feront presque seulement acte de candidature symbolique, ils n’iront sûrement pas faire campagne dans les communautés », a déclaré Sebastián de la Rosa Peláez.

« Parmi nos candidats aux élections municipales qui ont souhaité retirer leur candidature, beaucoup avaient reçu la visite d’inconnus qui leur ont dit, poliment, de ne pas poursuivre, ce qui pourrait être interprété comme une menace », a déclaré Sergio Montes Carrillo, porte-parole de la coordination de MC pour l’État de Guerrero.

Dans le cas de la municipalité de Chilapa, où tous les partis ont enregistré leurs candidats ou candidates, MC considère que c’est à haut risque et prévoit donc qu’ils pourraient être amenés à abandonner la campagne à tout moment.

Depuis les élections de 2015, après qu’un groupe armé a abattu Ulises Fabián Quiroz, le candidat du PRI à la mairie de Chilapa, le parti tricolore n’a pas lâché ce district sur le plan électoral. Les campagnes n’ont pas encore commencé à Chilapa et deux militants connus de Morena ont déjà été abattus par des membres d’une organisation criminelle.

Dans la nuit du 12 mars, le candidat de Morena à la mairie de Chilapa, Tomás Morales Patrón, a été abattu, apparemment par un seul homme, alors qu’il arrivait à son domicile situé entre les rues 10 Norte et Río Ajolotero, dans le centre-ville de cette municipalité.

Sept jours plus tard, le 20 mars, à quelques rues de la place centrale de Chilapa, des hommes armés ont abattu le conseiller municipal moréniste et militant pour les traditions et coutumes indiennes, Antonio Crespo Bolaños.

Le dirigeant de Morena au niveau du Guerrero, Jacinto González, a indiqué avoir été informé par ses propres militants d’une liste de huit autres militants reconnus de Morena susceptibles d’être attaqués. Il a décidé d’inscrire comme candidate Paula Angélica Miranda Silva qui était déléguée des programmes sociaux de l’État dans la région de Montaña Baja.

Sergio Montes a déclaré que MC considère les élections de 2024 plus « compliquées » que celles de 2021, en raison de l’insécurité et de la violence qui règnent dans presque tout le Guerrero.

Le 2 juin, les électeurs éliront 83 maires et 28 députés de l’État. Dans les municipalités de peuples autochtones d’Ayutla de los Libres et de Na Savi, les autorités seront élues selon leurs us et coutumes par le biais d’assemblées.

Alejandro Bravo Abarca, leader du PRI dans le Guerrero, a déclaré que son parti, en alliance avec le PAN et le PRD, a enregistré des candidats ou des candidates dans les 83 municipalités et les 28 districts locaux. Cependant, il a déclaré que les candidats de l’alliance sont bien conscients des risques liés au fait de faire campagne, en particulier dans les municipalités où la violence et l’insécurité sont omniprésentes.

« Nous recommandons à nos candidats et candidates de prendre des précautions et de ne pas s’exposer », a déclaré Alejandro Bravo.

La campagne des élections municipales de l’État de Guerrero débute le 20 avril.

L’IEPC a signalé que quelques jours avant le début de la campagne de l’élection des députés de l’État dans les 28 districts, cinq candidats ont demandé des mesures de protection en raison de menaces présumées des organisations criminelles.

Les demandes de protection ont été transmises au Secrétariat général du gouvernement, qui, à son tour, les a transmises au Secrétariat de la sécurité publique, afin qu’il autorise l’envoi de policiers de l’État pour protéger les candidats.

« Ces démarches sont très bureaucratiques, car une fois que la demande est envoyée au gouvernement de l’État par l’IEPC, il faut attendre jusqu’à neuf jours pour obtenir l’autorisation. Que se passe-t-il s’il arrive déjà quelque chose au candidat pendant ce lapse de temps ? » a demandé l’un des candidats ayant sollicité des mesures de protection.


 Dial – Diffusion de l’information sur l’Amérique latine – D 3702.
 Traduction d’Angela Berrocq pour Dial.
 Source (espagnol) : Amapola, 7 avril 2024.

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[1De fait, alors que la campagne électorale se termine, 8 personnes ont été assassinées, un candidat à un poste de maire, un candidat à un poste de conseiller municipal et 6 candidats à des fonctions publiques. Voir, du même auteur, « Concluyen campañas con un candidato a alcalde, otro a regidor y seis aspirantes asesinados », Amapola, 30 mai 2024.

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