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DIAL 2675

HAITI - Des intellectuels et artistes haïtiens se démarquent des célébrations officielles du bicentenaire d’Haïti. Par ailleurs, un groupe de défense de la liberté de la presse critique vivement le gouvernement.

jeudi 16 octobre 2003, mis en ligne par Dial

Nous publions ci-dessous une “Déclaration de principe sur le Bicentenaire” de l’indépendance d’Haïti qui sera célébré en 2004, datée du 29 septembre, par des intellectuels et artistes haïtiens. On pourra lire également des extraits d’une déclaration du Groupe de réflexion et d’action pour la liberté de la presse (GRALIP) du 22 septembre 2003. Ces deux textes, diffusés par AlterPresse, reflètent la grave situation qui sévit en Haïti et le comportement scandaleux du pouvoir « lavalas » en place.


L’année 2004 est proche et ramène le 200ème anniversaire de l’indépendance de la République d’Haïti. Nous, artistes, écrivains/nes, intellectuels/elles, éducateurs/trices, signataires de la présente déclaration, conscients de la portée de cet événement tant sur le plan national que sur le plan universel, tenons à exprimer notre vision et notre position par rapport aux manifestations qui auront lieu en la circonstance.

L’indépendance d’Haïti réalisée en 1804 est le résultat d’un ensemble de luttes entreprises à Saint-Domingue contre l’esclavage. Cet événement a entraîné toute la chaîne des abolitions au cours du XIXème siècle dans la région Caraïbe et latino-américaine et représente une date de première importance dans l’histoire universelle en tant que moment d’application concrète des principes d’égalité et de liberté.

Nos inquiétudes sont grandes devant l’orientation que le gouvernement haïtien actuel est en train de donner à la célébration officielle du Bicentenaire de notre indépendance. En effet, ce gouvernement travaille aujourd’hui à canaliser toute l’attention de la communauté internationale et des personnalités étrangères intéressées par le Bicentenaire vers une campagne de propagande aux fins de légitimation d’un pouvoir usurpé et reconnu aujourd’hui comme despotique et totalitaire, négateur des principes et des valeurs à la base de la révolution haïtienne.

A trois mois de la célébration du Bicentenaire de la République d’Haïti :

1) Les démarches de réparation et de restitution ne constituent aujourd’hui qu’une tentative désespérée du pouvoir pour faire diversion par rapport à ses propres responsabilités et trouver un bouc émissaire en couverture à son échec. Nous reconnaissons la nécesité d’une réflexion, d’un dialogue voire d’une action à venir à la mesure de la complexité de ces notions. De telles démarches ne peuvent être envisagées qu’entre partenaires responsables partageant les valeurs fondatrices de liberté, d’égalité et de respect de la personne humaine. La dérive totalitaire, l’incompétence et la corruption qui caractérisent l’actuel gouvernement le disqualifient en ce qui a trait à la conduite de cette procédure.

2) Les conditions d’existence révoltantes de huit millions d’Haïtiens et d’Haïtiennes ne font que se détériorer, face à l’incapacité et l’inaction d’un gouvernement qui dilapide, gaspille les fonds publics et détruit la structure administrative. De plus, ce gouvernement installe à dessein la société haïtienne dans l’insécurité aux seules fins de se perpétuer au pouvoir : les vols, les viols, les disparitions, les harcèlements et les assassinats sont en effet le lot quotidien de la population.

3) Tandis qu’une vingtaine de journalistes ont été contraints à l’exil, l’assassinat de deux d’entre eux est resté impuni alors que, dans l’un des cas, les meurtriers, partisans du gouvernement en place, ont publiquement revendiqué leur crime et continuent à fanfaronner sans avoir jamais été appréhendés. Ces mêmes partisans continuent de maintenir les journalistes et les organes de presse indépendants sous la menace constante de leurs violences.

4) Le pluralisme politique est systématiquement refusé par l’actuel gouvernement. En témoignent la mise à sac et l’incendie des locaux de la plupart des partis politiques de l’opposition et les arrestations arbitraires régulières et les disparitions de militants et de militantes politiques. Cela malgré les prescrits de la Constitution, malgré les protestations de tous les secteurs de la vie nationale répercutées dans la résolution 822 de l’Organisation des États américains (OEA).

5) Enfin le droit à la libre circulation des hommes et des femmes n’est pas reconnu. Certaines portions du territoire sont officiellement interdites aux partis politiques de l’opposition et aux organisations de la société civile.

Face à cette dérive totalitaire, nous, artistes, écrivains/nes, intellectuels/elles, éducateurs/trices

 Déclarons refuser de nous associer à des célébrations officielles à travers lesquelles le gouvernement ne vise qu’à rechercher une impossible légitimité. Ne pas nous associer au gouvernement, ce n’est pas nous opposer à l’unité haïtienne, c’est au contraire la défendre.

 Invitons le peuple haïtien et les institutions et personnalités étrangères à ne pas se prêter aux manipulations et aux tentatives de séduction du pouvoir tyrannique établi actuellement en Haïti. Il serait dommage que ce pouvoir puisse à l’avenir se prévaloir de la passivité de ses victimes et/ou de l’appui de personnalités et d’institutions étrangères dont l’action, fondée sur une intention bienveillante, ne viendrait que le sortir de l’isolement auquel l’Histoire et le peuple haïtien qu’il martyrise entendent bien le condamner.

Port-au-Prince, 29 septembre 2003
(suit la liste des signataires)


 Dial – Diffusion d’information sur l’Amérique latine – D 2675.
 Traduction Dial.
 Source (français) : Déclaration du Groupe de réflexion et d’action pour la liberté de la presse (GRALIP) du 22 septembre 2003, diffusés par AlterPresse.

En cas de reproduction, mentionner la source francaise (Dial) et l’adresse internet de l’article.

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