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L’actualité en bref - septembre 2003

Nicolas Pinet

mercredi 1er octobre 2003, mis en ligne par Dial, Nicolas Pinet

AMÉRIQUE LATINE

Les évêques catholiques des pays du Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay et Uruguay), de Bolivie et du Chili se sont réunis du 2 au 4 septembre à Montevideo, pour réfléchir aux défis que représente l’intégration de l’Amérique latine et pour analyser le projet de création de la ZLÉA (Zone de libre-échange des Amériques) d’un point de vue « éthique et moral ». Leurs principales objections à la ZLÉA sont qu’elle bénéficiera surtout aux pays les plus riches, comme le Canada et les États-Unis, au détriment des pays moins compétitifs, et qu’elle consolidera à l’échelle continentale un libéralisme « sauvage ».

La Cinquième Conférence ministérielle de l’OMC (Organisation mondiale du commerce), qui s’est tenue du 10 au 14 septembre à Cancún au Mexique et s’est soldée par un échec, semble marquer l’émergence d’un nouvel équilibre des forces entre les 146 pays membres. Quelques semaines avant la conférence a été créé le Groupe des 22 pays en voie de développement (G-22 – Argentine, Brésil, Bolivie, Chili, Chine, Colombie, Costa Rica, Cuba, Équateur, Égypte, El Salvador, Philippines, Guatemala, Inde, Mexique, Pakistan, Paraguay, Pérou, Afrique du Sud, Thaïlande, Turquie et Venezuela). L’initiative cherchait à constituer un contrepoids réel lors des négociations avec les États-Unis, l’Union européenne et le Japon. Le G-22 a exigé des pays du Nord qu’ils honorent leur engagement concernant la suppression des subventions agricoles avant d’aborder les autres points prévus en 2001 à Doha, ce qui a provoqué l’échec de la conférence.

Selon un rapport publié lundi 22 septembre par le Fonds d’éducation du Groupe de travail sur l’Amérique latine (LAWGEF), le Centre pour la politique internationale (CIP) et le Bureau de Washington pour l’Amérique latine (WOLA), l’aide militaire attribuée par les États-Unis à l’Amérique latine a été plus que multipliée par 3 durant les 5 dernières années. Les militaires colombiens constituaient en 2002 la moitié des latino-américains participants aux programmes états-uniens d’entraînement militaire.

MERCOSUR

Les maires et chefs de gouvernements locaux de 50 villes du Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay et Uruguay) et des pays associés (Bolivie, Chili) se sont réunis du 17 au 19 septembre lors du Sommet des Mercovilles, intitulé « Villes pour l’insertion sociale et l’intégration régionale : instruments pour la création de travail et d’emploi ». Ils ont souligné que le Mercosur vit un moment privilégié depuis sa création en 1991, les présidents des deux pays principaux, Néstor Kirchner et Luiz Inácio Lula da Silva, ayant fait de son approfondissement une priorité de leur politique extérieure. Leur déclaration finale insiste sur leur volonté de « construire un espace d’intégration plus réel et tangible, radicalement distinct à celui qu’on a traité d’imposer à partir de la vision de l’orthodoxie libérale, fondée sur la seule ouverture commerciale ».

ARGENTINE

Le Procureur fédéral d’Argentine a ordonné, jeudi 4 septembre, la détention de 38 militaires et 3 civils accusés de graves violations des droits humains durant la dictature (1976-1983), quelques jours après l’annulation des lois du « Point final » (1986) et de l’« Obéissance due » (1987), qui avaient interrompu les procès. L’ancien capitaine Alfredo Astiz, symbole de la répression durant la dictature a été arrêté, mardi 16 septembre, tout comme 12 autres militaires impliqués dans l’instruction en cours concernant l’École de mécanique de la Marine (ESMA), centre clandestin de détention, de torture et de disparition forcée, par lequel passèrent quelque 5 000 prisonniers.

Jeudi 11 septembre, le président Kirchner annonçait qu’il avait trouvé un accord avec le FMI (Fonds monétaire international) pour rééchelonner une partie de sa dette externe. La nouvelle a été accueillie favorablement par l’ensemble du spectre politique. Le président a souligné l’importance du soutien des États-Unis, dont le secrétaire au Trésor était intervenu deux jours plus tôt pour réclamer une solution rapide. Il a aussi déclaré que, sans être « la panacée loin s’en faut », l’accord constituait « un pont d’or pour reconstruire progressivement » le pays. Le total de la dette représente 150 % du produit intérieur brut (145 000 millions de dollars). Lundi 22, le gouvernement a proposé un plan complexe de réaménagement de sa dette privée (95 000 millions de dollars), pour mettre fin à la cessation de paiements déclarée en décembre 2001. La proposition, qui ne prend pas en compte les intérêts accumulés depuis la cessation, prévoit de rembourser seulement 25 % du total actuel. Pour le chef de cabinet du ministère de l’économie, Alberto Fernández, il s’agit de « trouver un équilibre réaliste entre ce que le pays produit, ce qu’il doit et ce qu’il peut payer ».

Néstor Kirchner a présenté au Congrès, mercredi 17 septembre, son projet de budget pour l’année 2004. Tout en prévoyant un excédent nécessaire au paiement de la dette, le budget prévoit d’augmenter les dépenses de 8 % par rapport au budget précédent, l’augmentation étant de 35 % pour la sécurité sociale, 21 % pour l’infrastructure, 19 % pour l’éducation et 50 % pour les sciences et technologies.

BOLIVIE

Dans la seconde moitié de septembre, les mobilisations contre le gouvernement ont repris avec force, avec blocages de route, grèves, et même quelques affrontements armés. Le projet de cession de l’exploitation du gaz naturel à une entreprise chargée de l’exporter vers l’Amérique du nord via un port chilien, ou péruvien, est une des causes du mécontentement. Evo Morales, leader du MAS (Mouvement vers le socialisme), critique notamment le fait que la législation actuelle ne laisserait à l’État qu’une maigre part des bénéfices.

BRÉSIL

Malgré la récession et le maintien d’un taux important de chômeurs (12,8 %), malgré les critiques adressées au gouvernement, accusé de prendre des mesures que le PT (Parti des travailleurs) avait critiqué dans le passé – comme par exemple la réforme des retraites –, l’image de Lula reste « bonne ou excellente » pour 45 % des personnes consultées lors du dernier sondage publié dans le journal Folha de Sao Paulo et réalisé fin août – soit 3 % de plus que lors du dernier sondage, en juin. 10 % considèrent sa politique « mauvaise ou désastreuse », et 42 % comme « acceptable ».

Le programme « Brésil alphabétisé », annoncé par le président Lula le 8 septembre prévoit d’atteindre 20 millions de personnes de plus de 15 ans dans les 4 ans à venir, en s’appuyant sur les expériences passées en la matière et les projets déjà en place. En 2001, le pays comptait 12,4 % d’illettrés, soit plus que la Colombie ou l’Équateur (8,4 %) ou que le Pérou (10,1 %), selon les chiffres de l’UNESCO.

Le président brésilien est arrivé vendredi 26 septembre à La Havane, pour une visite officielle de 4 jours. L’accent devrait surtout porter sur des questions de coopération et de commerce. Sont notamment prévues la signature de divers accords visant à renforcer les relations bilatérales et la négociation d’un crédit de la banque nationale brésilienne destiné à l’achat de produits brésiliens.

CHILI

Le trentième anniversaire du coup d’État du 11 septembre 1973 a marqué une évolution importante du rapport au passé récent. Les chaînes de télévision, et dans une moindre mesure, la presse et la radio, ont consacré de nombreux reportages en profondeur – une trentaine – sur les événements d’avant et d’après 1973, produisant une sorte de surexposition médiatique – inédite. Dans le même temps, et aussi bien au Chili que dans d’autres pays du monde, étaient organisés colloques, commémorations et concerts. Le 10 septembre, une cérémonie d’hommage au président défunt était organisée par le ministre de l’intérieur, José Miguel Insulza, à La Moneda, le palais présidentiel, bombardé trente ans plus tôt. En présence d’Hortensia Bussi, la veuve d’Allende, de sa fille, Isabel Allende, l’actuelle présidente de la Chambre des députés, et de nombreux invités, fut inaugurée une plaque commémorative à l’endroit où le président se suicida, ainsi qu’un tableau représentant Allende au balcon de La Moneda, après son élection le 4 septembre 1973, et une photo montrant ce même balcon après le bombardement du 11 septembre. Le lendemain, au cours d’une seconde cérémonie, le président Ricardo Lagos inaugurait la nouvelle porte de Morandé 80, située sur la façade est de La Moneda : entrée traditionnelle des présidents avant 1973, et porte d’évacuation du corps d’Allende le 11 septembre, elle avait été supprimée lors de la reconstruction du palais en 1980. La traditionnelle marche en direction du mémorial des détenus-disparus, situé à l’intérieur du Cimetière général, eut lieu le dimanche 14. Le 23 septembre se célébrait aussi le trentième anniversaire de la mort de Pablo Neruda.

COLOMBIE

Des organisations non gouvernementales colombiennes ont demandé aux États-Unis de suspendre l’assistance militaire octroyée à la Colombie, considérant que les conditions requises en matière de respect des droits humains ne sont pas respectées. Au-delà de la suspension de l’aide, l’objectif de la demande est d’inciter le Congrès états-unien à s’assurer que les engagements en la matière soient effectivement tenus.

Fin septembre, un groupe de sénateurs colombiens a demandé au gouvernement de retirer le projet de loi, présenté fin août, prévoyant la liberté conditionnelle pour les membres des groupes armés accusés de crimes contre l’humanité qui accepteraient de se joindre à la démobilisation – il suggère d’attendre au moins que le dialogue de paix avec les AUC (Autodéfenses unies de Colombie, groupes paramilitaires) débute formellement.

COSTA RICA

Le 6 juin 2002, le ministre de la sécurité publique, Rogelio Ramos, et l’ambassadeur états-unien, John Danilovich, avaient signé un accord prévoyant la création d’une Académie internationale pour le respect de la loi (ILEA), dirigée par les États-Unis – il en existe déjà une à Bangkok, à Budapest, à Gaborone et à Roswell, au sud des États-Unis. Le projet de loi, qui est actuellement à l’étude au Congrès législatif, a déclenché une forte polémique, les critiques portant notamment sur l’atteinte que cela représenterait à la souveraineté et à la politique de neutralité du pays.

CUBA

Les évêques catholiques cubains publiaient lundi 8 septembre une déclaration intitulée L’amour espère tout dans laquelle ils déplorent le retour au langage et aux méthodes des premiers temps de la révolution cubaine et demandent plus de liberté publique pour l’Église.

Le 4 novembre, l’Assemblée générale de l’ONU analysera comme chaque année depuis 1992, la question du blocus états-unien. Dans une conférence de presse donnée mardi 16 septembre, le chancelier cubain Felipe Pérez Roque a rappelé que les 15 pays de l’Union européenne ont, ces dernières années, voté en faveur de résolutions demandant la levée des sanctions économiques et commerciales imposées par les États-Unis. Il a déclaré qu’il espérait qu’il en serait de même cette année, malgré les tensions diplomatiques qu’a provoqué l’exécution des 3 personnes qui avaient tenté de détourner une embarcation.

L’opposition modérée a présenté, mardi 16 septembre, une Lettre des droits et des devoirs fondamentaux des Cubains, autour de laquelle elle voudrait promouvoir un dialogue par le biais de « maisons de promotion des droits ». Le document a été présenté avant sa diffusion à plus de 35 000 Cubains vivant à l’intérieur et à l’extérieur du pays, et environ 31 000 ont accepté la proposition sans modifications.

HAÏTI

Une manifestation, organisée par les partis de l’opposition et des groupes de la société civile, était prévue pour le 14 septembre dans la ville septentrionale de Cap-Haïtien pour demander la démission du président Aristide. Quelques jours avant, le parti Familia Lavalas annonça une contre-manifestation le même jour et au même endroit, déclarant que si l’opposition manifestait elle aussi, un bain de sang se produirait, rendant caduques les efforts de l’opposition.

Le 22 septembre, la découverte dans la ville de Gonaïves du corps d’Amiot Métayer, le leader de l’« Armée cannibale » a déclenché de violents affrontements entre le groupe et la police. Métayer, ancien allié du gouvernement, avait été emprisonné en 2002 pour des délits mineurs. Il s’était évadé de manière spectaculaire de la prison grâce à l’intervention de sa bande. Depuis lors, l’Organisation des États américains (OEA), des organisations de droits humains ainsi que divers gouvernements étrangers réclamaient sa capture, l’accusant d’être responsable de la violence politique et notamment de la pendaison d’un membre de l’opposition en décembre 2001. Son arrestation était considérée comme une étape nécessaire pour mettre fin au blocage politique. Mais les charges qui pesaient contre lui furent retirées. Les résidents de Raboteau, son quartier, et l’Armée cannibale se sont soulevés, accusant le président Jean-Bertrand Aristide de la mort de leur leader – le jour précédant sa mort Métayer était sorti de chez lui accompagné d’un ancien employé du Palais national.

MEXIQUE

Le président Vicente Fox, présentant au Congrès législatif, le 1er septembre, son troisième rapport annuel, a mis de côté son triomphalisme des années précédentes et reconnu que le pays doit résoudre de graves problèmes sociaux et que son gouvernement peut mieux faire. Le Parti action nationale (PAN) a perdu 55 sièges (sur les 206 qu’il détenait) aux élections des députés du 6 juillet, ce qui a été considéré comme l’expression d’un mécontentement vis-à-vis de la gestion gouvernementale.

Fin septembre, le président brésilien, Luiz Inácio Lula da Silva, a rendu une courte visite à son homologue mexicain, avant de se rendre à Cuba. Lors de leur troisième rencontre de l’année, les deux présidents ont mis au point quelques mesures de coopération. Les deux pays, qui représentent à eux seuls 61 % du PIB (Produit intérieur brut) d’Amérique latine défendent des politiques différentes – le Brésil se montre par exemple prudent vis-à-vis de la ZLÉA, alors que le Mexique s’en est fait l’un des promoteurs –, et aspirent tous deux à devenir le porte-parole du sous-continent.

PARAGUAY

Le nouveau président Nicanor Duarte Frutos, au pouvoir depuis le 15 août, a pris diverses mesures pour tenter de freiner la corruption en matière de douanes et d’impôts. Mais la nomination à des postes de responsabilité de quelques personnalités à la réputation entachée par des affaires de corruption jette le doute sur la crédibilité de sa politique.

PÉROU

La Banque interaméricaine de développement (BID) a donné son accord, mercredi 10 septembre, à l’octroi d’un crédit de 135 millions de dollars destinés à la construction du gazoduc de Camisea, dont 60 % a déjà été réalisé, malgré les problèmes que le projet soulève en matière de respect de l’environnement et qui avaient motivé le refus de la Banque du commerce extérieur des États-Unis (Eximbank), une semaine plus tôt. Les organisations de la société civile impliquées dans la lutte contre le projet reprochent aux États-Unis d’avoir choisi de s’abstenir au lieu de voter contre, ce qui a pu inciter certains pays à voter en faveur du projet.

VENEZUELA

L’économie vénézuélienne devrait commencer à sortir de la récession à la fin de l’année, pour retrouver la croissance en 2004. Le PIB national, d’environ 100 000 millions de dollars, dont le quart est assuré par la production de pétrole, diminuera de 10 à 11 % cette année, pour augmenter en 2004 de 5 %, selon les prévisions actuelles. Domingo Maza, directeur de la Banque centrale a cependant mis en garde contre les obstacles que représentent pour la récupération économique le contrôle des changes et les faiblesses que montre encore l’industrie pétrolière.

Mercredi 17 septembre, le tribunal chargé du procès des 4 partisans du président Chávez accusés d’avoir ouvert le feu contre une manifestation de l’opposition le 11 avril 2002 les a relevés des accusations qui pesaient contre eux, par manque de preuves.

Le nouveau Conseil national électoral a refusé, vendredi 12 septembre, la demande de l’opposition concernant la convocation d’un référendum révocatoire du mandat présidentiel d’Hugo Chávez – présentée le 20 août –, considérant que les 3,2 millions de signatures collectées ne remplissent pas certaines conditions indispensables : l’en-tête des pétitions ne demandait pas au Conseil de convoquer un référendum, comme l’exige la loi, mais déclarait simplement : « Nous, qui signons ci-dessous, avons décidé de convoquer un référendum… », ce qui a été considéré comme une usurpation. La décision a été prise à 3 voix contre 2. Vendredi 26, le Conseil donnait à connaître le règlement élaboré pour les demandes de référendum révocatoire, ainsi que le calendrier à respecter. Le règlement, constitué de 65 articles, a été adopté à l’unanimité des 5 membres. Les leaders de l’opposition ont annoncé qu’ils formuleraient leur demande de référendum au plus tard le 29 février 2004, date à laquelle se terminent les 155 jours de démarches administratives prévues par le Conseil.


 Dial – Diffusion de l’information sur l’Amérique latine – L’actualité en bref.

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