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DIAL 2324

MEXIQUE - Le traité de libre commerce entre le Mexique et l’Union européenne

Gilberto Silvestre

lundi 1er novembre 1999, mis en ligne par Dial

L’Union européenne et le Mexique sont toujours en négociations pour la mise au point du Traité de libre commerce prévu entre les deux partenaires. On comprendra mieux les inquiétudes de certaines organisations mexicaines populaires sur les effets prévisibles d’un tel traité si l’on se réfère, comme le font les auteurs ci-dessous, à un autre traité de libre commerce, l’ALENA, qui lie déjà ce pays aux États-Unis et au Canada. Article de Gilberto Silvestre (Centrale indépendante des ouvriers agricoles et paysans), Juan Carlos (Centrale paysanne cardéniste) et Refugio Quintana (Coalition des organisations démocratiques urbaines et paysannes), paru dans Boletín Campesino-indigena de intercambio informativo du 30 juillet 1999 (Quito, Équateur) publié par la Coordination latino-américaine des organisations paysannes.


Le Traité de libre commerce entre le Mexique et l’Union européenne est un exemple de la façon dont on pense construire la relation de l’Amérique latine et des Caraïbes avec l’Union européenne. Bien que l’Union européenne garde des relations différenciées avec les pays d’Amérique latine et des Caraïbes, il y a des questions communes que nous devons analyser ensemble. L’accord de l’« Association économique, concertation politique et coopération commerciale entre l’Union européenne et le Mexique », connu sous le nom d’Accord global reste verbal. Cet Accord contient la clause démocratique en faveur du développement social, mais il manque d’un mécanisme qui la rende obligatoire et qui garantisse son utilité pour assurer le respect des droits du travail, des droits sociaux, des droits concernant l’environnement et des droits humains en général.

Pour cette raison, des organisations de droits humains en matière de développement, d’organisation syndicale, d’environnement et d’égalité des sexes, aussi bien mexicaines qu’européennes et internationales ont demandé que ces obligations soient prises en compte dans les négociations commerciales avant que ne soit ratifié l’Accord global (signé le 8 décembre 1997 par les gouvernements concernés), au cours de cette année 1999, avant que ne soient achevées les négociations concernant l’accord intérimaire qui traite du commerce, des flux de capitaux, des achats publics et des droits de propriété intellectuelle.

Dans le cas de l’Accord global, un tiers des députés du Parlement européen ont manifesté leur opposition à le voter, tandis que le reste avance dans le sens de son approbation.

Le Traité de libre commerce Mexique-Union européenne ne fait aucune mention des différences abyssales qui existent entre le Mexique et l’Union européenne. En conséquence, cet Accord est un mécanisme de plus dans le processus de globalisation au bénéfice des grandes entreprises transnationales. On ne tient compte d’aucune manière du dumping social qui peut se produire au détriment des travailleurs tant mexicains qu’européens. Bien plus, dans l’Accord global, on ne propose aucun mécanisme compensatoire ni aucun fonds pour parvenir à rétablir un équilibre entre les différentes économies comme cela existe à l’intérieur de l’Union européenne qui aide à égaliser les standards sociaux et à corriger l’asymétrie qui existe entre les pays. L’Accord global vise plutôt à offrir aux grands capitaux un accord semblable au Traité de libre commerce entre le Mexique, les États-Unis et le Canada (ALENA), qui a porté préjudice aux travailleurs et aux normes de sauvegarde de l’environnement au Mexique.

Pour cela les gouvernements de l’Union européenne et de la Commission ont pressé le gouvernement mexicain de déréguler, dans les plus courts délais possibles, tout ce qui concerne le commerce. Un accord semblable au Traité du libre commerce de l’Amérique du Nord, avec l’Union européenne, aggraverait encore plus l’inégalité économique et sociale tant au Mexique que dans le reste du monde.

L’expérience de l’ALENA

L’expérience de l’ALENA a montré que, au-delà des bénéfices obtenus par une poignée d’entreprises privilégiées par le gouvernement, les effets économiques, sociaux, environnementaux et culturels du traité ont affecté et transformé tout le pays. C’est pourquoi on ne peut pas acquiescer, sous la pression européenne, à une ouverture sans discrimination et qui de plus accorde à l’Union européenne les mêmes conditions que le gouvernement mexicain a concédé aux voisins du Nord.

Il est profondément injuste que l’on mette en compétition tous les secteurs qui manquent d’un minimum d’aide, en raison des politiques d’ajustement structurel, y compris pour leur survie dans le marché intérieur, avec des secteurs qui reçoivent en Europe des milliards de subsides. La position de nombreux producteurs au Mexique, spécialement ceux de la campagne, est claire : ou on harmonise les aides, ou on exclut de la négociation les secteurs défavorisés !

Au Mexique, le peuple réclame le respect des droits humains ; il est injuste que les intérêts commerciaux et ceux des investisseurs utilisent la rhétorique et la démagogie pour promouvoir leurs intérêts. Une plus grande participation de la majorité des producteurs mexicains et des organisations civiles est impérative.

L’Accord global entre le Mexique et l’Union européenne, loin d’inclure des mécanismes concrets pour la réalisation de tous les droits humains, du développement social et de la démocratie, s’en sert comme de pures déclarations de bonnes intentions et rien de plus. Au Mexique la non-réalisation de tous ces droits et l’absence de politiques économiques adéquates pour un développement social juste et équitable, est notoire, mais en dépit de cela, les négociateurs de l’Union européenne n’écoutent que le gouvernement mexicain, dont la version des faits est très loin de la vérité et de toute vérification.

L’Accord multilatéral sur les investissements (AMI) battu en brèche par des centaines d’organisations sociales dans leur forum original l’OCDE, a donné lieu à une série d’accords bilatéraux. Les clauses de l’AMI, qui étaient élaborées fondamentalement pour octroyer tous les privilèges et garanties possibles aux investisseurs par delà les droits des peuples, se retrouvent dans les négociations entre le Mexique et l’Union européenne.

En dépit de toutes les déclarations faites autour du Sommet des chefs d’État qui s’est tenu à Rio de Janeiro, fin juin 1999, le modèle de l’accord entre le Mexique et l’Union européenne est celui qui sera proposé au reste des pays latino-américains. C’est le moment d’élever la voix pour affirmer qu’aucun Latino-Américain ne veut revenir au colonialisme du passé ni au néocolonialisme financier des grandes transnationales, qu’elles soient d’origine nord-américaine, européenne ou même latino-américaine.

Les sociétés européenne et latino-américaine doivent accorder toute l’attention possible aux accords que l’Union européenne signe avec le Mexique.

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 Dial – Diffusion de l’information sur l’Amérique latine – D 2324.
 Traduction Dial.
 Source (espagnol) : Boletín Campesino-indigena de intercambio informativo, juillet 1999.
 
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